Noam Chomsky : « Les responsables du désastre néolibéral feront tout pour que leur monde perdure. »

Source : La Progressive, Kelly Candaele, Noam Chomsky

Traduit les lecteurs Les-Crises

Noam Chomsky

Interview d’un socialiste libertarien

[Le libertarianisme, aussi appelé libertarisme (à ne pas confondre avec libertaire), est une philosophie politique, développée principalement aux États-Unis et dans quelques pays anglo-saxons, pour laquelle une société juste est une société dont les institutions respectent et protègent la liberté de chaque individu d’exercer son plein droit de propriété sur lui-même ainsi que les droits de propriété qu’il a légitimement acquis sur des objets extérieur,NdT]

A 92 ans, Noam Chomsky demeure un activiste politique. Dans ses interviews récentes et dans un nouveau livre, Chomsky for Activists[Chomsky pour les militants, livre non traduit de Charles Derber et Noam Chomsky,Ndt], il retrace son engagement politique personnel, qui remonte aux mouvements des droits civiques et à ceux en opposition à la guerre dans les années 60, et il propose aux activistes d’aujourd’hui des enseignements et des mises en garde.

Chomsky a toujours soutenu l’idée que les intellectuels doivent jouer un rôle d’opposition au sein de la société. Son essai de 1967, Responsibility of Intellectuals, était une critique accablante de la complicité des intellectuels et des bureaucrates de la politique dans le désastre du Vietnam, il préconisait aux Américains de « suivre le chemin de l’intégrité, quel que soit l’endroit où celui-ci vous mène. »

Considéré par bien des conservateurs ainsi que par certains au sein de la gauche comme désinvolte dans sa critique des États-Unis, il n’a pas hésité à dénoncer la suffisance morale américaine, et son mauvais usage du pouvoir.

Pionnier dans le domaine de la linguistique et dans celui du développement du langage au MIT pendant plus de 60 ans, Chomsky a consacré la majeure partie de sa vie à l’écriture et à l’action politique. Au téléphone depuis son domicile de Tucson, Arizona, il a déclaré à Capital & Main : « Si vous pensez que le problème est sérieux, et que vous savez que vous pouvez agir, alors, pour des raisons éthiques simples, vous avez le devoir de faire ce que vous pouvez – ce qui implique devenir un activiste. » L’interview qui suit a été remaniée pour des raisons de longueur et de lisibilité.

Kelly Candaele : En lisant Chomsky for Activists, j’ai été frappé de voir à quel point vous êtes motivé par les changements positifs intervenus depuis les années 60.

Noam Chomsky : Autrefois les États-Unis avaient des lois contre le métissage si extrêmes que même les Nazis ne voulaient pas aller aussi loin que ce que nous avons fait ici. Les Afro-américains étaient exclus de la propriété foncière parce qu’ils ne pouvaient pas accéder au logement. Jusqu’aux années 60 il n’y avait aucun mouvement environnemental et pas d’opposition à l’agression. Il a fallu travailler dur jusqu’à la fin des années 60 pour organiser une opposition au Vietnam, le pire crime commis depuis la Seconde Guerre Mondiale. Quand finalement nous nous sommes engagés dans la guerre en Irak, l’opposition à l’agression était si extrême que la guerre a donné lieu à des manifestations virulentes avant même d’être déclarée. Seul un travail militant déterminé a obtenu ce résultat.

Vous soulignez que certains mouvements qui prônent le changement social ont plus de succès que d’autres.

Dans une conférence abordant un grand nombre de sujets, le rebelle aux nombreuses causes, âgé de 92 ans, discute du rôle des militants, des intellectuels, et de Joe Biden en Amérique.

Aujourd’hui, on compare Black Lives Matter avec Antifa. Antifa est une proposition perdante, et un cadeau à la droite. Black Lives Matter, en revanche, a été un mouvement au succès étonnant, la solidarité entre les Noirs et les Blancs soutenue par une écrasante majorité de la population. C’est le résultat de nombreuses années d’organisation militante.

A quoi attribuez vous le fait que la popularité politique de Donald Trump dure si longtemps ?

Trump est un homme qui a réussi à inspirer confiance. Pendant les 40 dernières années, la fortune des 1% d’américains les plus riches a doublé, passant de 10% à 20% de la richesse totale aux Etats Unis. Les gens ne connaissent peut être pas ce chiffre, mais il savent que les salaires réels sont en fait plus bas aujourd’hui qu’en 1979. Tout cela conduit à la colère et à une aspiration au changement. Une voie possible de changement est grosso modo celle des sociaux démocrates modérés – en gros le mouvement de Bernie Sanders. L’autre forme de changement est celui que Trump a préconisé, qui a en fait [conduit à] enrichi encore davantage ceux qui étaient déjà très riches.

Le Président Biden a ré-intégré l’accord de Paris sur le climat, fait adopter un plan de relance massif, et mis en place un grand projet d’infrastructure avec des composantes environnementales significatives. Et il s’est prononcé en faveur des travailleurs à l’occasion du vote Amazon dans l’Alabama. Tout ce qu’il fait va dans le bon sens, n’est-ce pas ?

Pour certaines des choses que vous avez citées, oui. Pour d’autres, Biden a partiellement raison. La loi de relance économique a été votée malgré l’opposition de 100% des Républicains, c’est vrai. S’il a pris cette direction, c’est sous la pression d’un travail militant très intense. Au sujet des lois climat, et compte tenu d’une pression militante significative, Biden a en effet mis en place un programme climat assez sensé, meilleur que tout ce qui a précédé.

Vous consacrez la majeure partie, sinon la totalité, de votre attention et de votre analyse aux militants qui poussent les politiciens dans une direction particulière, comme si ces derniers n’avaient pas de convictions politiques eux-mêmes. Qu’en est-il des compétences réelles qu’un politicien doit avoir pour conforter les acquis législatifs ?

Prenons la politique climatique de Biden. Depuis des années, les activistes font pression pour que l’on fasse quelque chose pour sauver les espèces de l’extinction et pour mettre en place une sorte de New Deal vert. Il y a quelques années, cette question n’était absolument pas à l’ordre du jour. Les militants sont allés jusqu’à occuper les bureaux du Congrès et ils ont obtenu le soutien de jeunes leaders arrivés au Congrès avec la vague Sanders. C’est de là que vient le programme de Biden. Maintenant, vous avez raison : il faut des compétences pour en faire un programme législatif. Mais ces compétences ne seront pas exercées à moins qu’il n’y ait une pression de la base pour que cela se produise.

Jeff Bezos, le propriétaire d’Amazon, dit qu’il est en faveur de Black Lives Matter, des droits LGBTQ, des droits des femmes. Pourtant, la seule cause progressiste qu’il ne soutiendra pas est le droit d’avoir un syndicat dans l’un de ses établissements.

Si vous voulez connaître son attitude envers les femmes, jetez un coup d’œil à un entrepôt Amazon. Les conditions de travail y sont horribles. Si vous voulez connaître son attitude envers les travailleurs, jetez un coup d’œil aux personnes qui effectuent les livraisons. Son système est soigneusement construit pour que les chauffeurs qui livrent les marchandises ne soient pas ses employés. Ils sont gérés par de petites entreprises qui passent des contrats avec Amazon, ce qui signifie qu’ils peuvent avoir des salaires déplorables et être sous étroite surveillance pour s’assurer que les chauffeurs se rendent aussi vite que possible à leur lieu de destination. Et Jeff Bezos peut dire : « Je ne suis au courant de rien, ce ne sont pas mes employés. » Bezos s’oppose au syndicalisme parce que c’est le seul moyen permettant aux travailleurs de se défendre contre des prédateurs de son espèce.

Votre livre What Kind of Creatures Are We? consacre un chapitre au bien commun, vous y évoquez ce que vous appelez la tradition « socialiste libertarienne ». Est-ce la tradition à laquelle vous vous identifiez en premier lieu ?

Oui, c’est toute ma vie. En Europe on appelle ça Socialiste libertaire. Aux États-Unis, c’est une variante de l’anarchisme. Le socialisme libertaire estime que les entreprises doivent être détenues et gérées de manière démocratique par les personnes qui y interviennent. Notre système actuel est totalitaire. Les ordres viennent du sommet et sont transmis à la base, et tout en bas de l’échelle, vous avez le droit de mettre votre travail en location pour survivre. Cela s’appelle avoir un emploi.

Les grandes bureaucraties ont évidemment leurs défauts. Mais avec les problèmes auxquels nous sommes confrontés, il semble que nous ayons besoin d’un gouvernement solide et actif, et aussi d’une approche internationale, afin de faire face à ces problèmes.

Le réchauffement climatique n’a pas de frontières. La pandémie n’a pas de frontières. La propagation des armes nucléaires – pas de frontières. Ce qui veut dire que nous devons faire preuve de solidarité et de coopération internationales. La question est de savoir quel type de structure permettrait d’y parvenir. Sera-t-elle autoritaire, avec une autorité d’en haut et des gens qui obéissent, ou devrait-elle être démocratique, avec une participation populaire à chaque niveau, depuis la communauté et le lieu de travail jusqu’aux grandes associations ?

Vous écrivez beaucoup sur la façon dont les médias fonctionnent. À droite, il y a Fox News, ainsi que QAnon, qui tous deux encouragent les gens à croire que toutes les institutions sont fondamentalement corrompues. Peut-on dire qu’une partie de l’approche critique de la gauche a, elle aussi, contribué à une méfiance à l’égard des médias et de nos institutions politiques ?

La gauche, dont je fais partie, est très critique à l’égard des médias depuis longtemps. Ce n’est pas qu’ils disent des mensonges. C’est que la structure institutionnelle des médias conduit à cadrer les actualités et à choisir les sujets, ce qui contribue à donner une image déformée du monde à bien des égards. Le type de critique dont vous parlez avec QAnon trouve son fondement dans le fait que la vie de beaucoup de gens a vraiment été affectée. Faites un tour dans l’Amérique rurale où les agriculteurs indépendants ont pour la plupart disparu. Traversez des villes rurales où les maisons sont à vendre et où les commerces sont fermés. Lorsque vous avez de telles conditions, les gens se mettent en colère et éprouvent du ressentiment.

La croissance de QAnon ne me semble pas réductible à l’économie, mais découle plutôt d’un besoin psychologique de sentir que vous avez accès à des connaissances ésotériques qui vous rendent spécial.

C’est vrai, on ne trouvait pas ce genre de choses quand j’étais enfant, dans les années 30, quand le mouvement ouvrier s’organisait. Il y avait un sentiment que nous pouvions avancer ensemble. C’est quand les gens voient les choses s’effondrer qu’on obtient QAnon. C’est la différence entre un militantisme organisé et efficace et une société en dissolution.

Ce que je voulais dire, c’est que lorsque la droite et la gauche affirment que nos principales institutions sociales et politiques sont avant tout les dépositaires d’un pouvoir malveillant, cela peut être très corrosif pour une société.

Eh bien, ce n’est pas ma position. Avec Biden, par exemple, il y a des aspects très positifs dans son programme. Dans la mesure où un public organisé, informé et déterminé peut influencer la politique, on peut avoir des institutions qui répondent aux besoins des gens. Comme le New Deal qui a bouleversé la vie des gens. L’administration s’est montrée sensible aux pressions populaires organisées. Ce n’est pas que les institutions soient nécessairement malveillantes, mais si elles dépendent d’un pouvoir privé qui n’a pas de comptes à rendre, oui, bien sûr, elles seront malveillantes.

En 2008, vous avez donné une conférence dans laquelle vous avez pointé du doigt trois choses qui pourraient menacer la planète : la guerre nucléaire, la catastrophe environnementale et une éventuelle pandémie. En ce qui concerne une éventuelle pandémie, faisiez-vous juste état de ce qui était disponible dans la littérature scientifique à l’époque ?

Je dois confesser une erreur que je regrette sérieusement. Je n’ai pas assez insisté sur la gravité des pandémies. On était au courant dès 2003, après que l’épidémie de SRAS a été contenue en Asie et que les scientifiques nous ont prévenus que nous allions être confrontés à des pandémies similaires, peut-être pires, et que nous ferions mieux de faire quelque chose. Les compagnies pharmaceutiques n’ont montré aucun intérêt parce que ce n’était pas rentable. Trump a démantelé le programme Obama de réponse aux pandémies. Il a commencé à couper les fonds des Centers for Disease Control. Des gens comme moi auraient dû lever la voix pour parler haut et fort de ce problème. Je ne l’ai pas fait et d’autres non plus, et c’est en partie la raison pour laquelle les États-Unis ont un niveau de réponse si désastreux par rapport aux autres pays.

Vous êtes depuis longtemps un observateur attentif de notre pays. Est-il possible d’avoir un aperçu de l’avenir en étudiant le passé ?

Bien sûr, si nous voyons une lutte constante – une sorte de lutte des classes pour parler de façon générale – entre les concentrations de richesse et de pouvoir, et les forces populaires qui tentent d’aller vers plus de liberté et de justice. Et nous les voyons en ce moment même, sous nos yeux. Nous finirons par vaincre la pandémie, tôt ou tard, mais à un coût terrible et inutile. Et alors vient la question : de quel genre de monde s’agira-t-il ? Ceux qui sont responsables du désastre néolibéral dont une grande partie de cette situation découle travaillent sans relâche pour que ce soit ce type de structure qui perdure. D’autres forces veulent aller vers un véritable internationalisme, un soutien mutuel et un contrôle plus démocratique. Les affaires humaines dépendent en grande partie du choix et de la volonté. Nous savons ce qui peut être fait et ce qui doit être fait. La question est de savoir si nous serons capables de le faire.

Je n’ai pas trouvé beaucoup de références à la littérature ou à la poésie dans vos écrits. Pensez-vous que la littérature et la poésie sont des sources qui nous aident à comprendre l’être humain et, si oui, quels sont les romanciers et les poètes que vous admirez ?

Comme je l’ai souvent dit, nous apprenons davantage sur les êtres humains et leur nature dans les romans du XIXe siècle que dans la psychologie universitaire. C’est une façon non seulement d’enrichir notre vie, mais aussi notre compréhension et notre conception de ce qu’est une vie agréable. La littérature, les arts, la musique ou la peinture sont quelques-uns des plus merveilleux chemins que nous empruntons pour comprendre ce que nous sommes et ce que nous pourrions être.

Kelly Candaele

Source : La Progressive, Kelly Candaele, Noam Chomsky, 09-04-2021

Aude : une convention pour préserver la ressource en eau

  • Les présidents.Les présidents. DR

EnvironnementAudeVie pratique – conso

Publié le 13/05/2021 à 05:12 , mis à jour à 09:51

Accompagner la demande en eau tout en veillant au respect des besoins écologiques du milieu aquatique : tel est l’enjeu de la mission ‘‘Préservation et optimisation des stockages d’eau existants’’.

La chambre d’agriculture et la Fédération de pêche de l’Aude viennent de signer une convention dans le but « d’agir dans l’intérêt général pour une gestion durable et équilibrée de la ressource en eau ». En effet, les deux structures partagent les orientations de gestion proposées par le Syndicat mixte des milieux aquatiques et des rivières de l’Aude et les services de l’Etat.

Tout comme le monde agricole, la Fédération prône une stabilité des niveaux dans les cours d’eau et dans des quantités suffisantes pour ne pas porter préjudice ni aux activités, ni au milieu. Dans ce même cadre, l’inventaire des retenues agricoles porté par la chambre (avec l’appui financier de l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée) démontre la richesse du département. C’est désormais l’enjeu de la mission « Préservation et optimisation des stockages d’eau existants », qui doit étudier la faisabilité de l’utilisation de certaines retenues pour accompagner la demande en eau tout en veillant au respect des besoins écologiques du milieu aquatique, notamment en période hydrique tendue. « Il s’agit d’une réelle opportunité d’allier les compétences des deux structures tant sur le volet agricole que l’analyse hydrobiologique, sans oublier le développement du loisir pêche en valorisant certains plans d’eau », soulignaient David Fernandez, pour les pêcheurs, et Philippe Vergnes, pour les agriculteurs.

Aménagements

En effet, certaines retenues, comme sur le bassin-versant du Sou, ont fait récemment l’objet d’une convention d’amodiation des baux de pêche vers la Fédération. Cette convention permet notamment à la Fédération d’obtenir des financements de ses partenaires pour réaliser des aménagements piscicoles (pose de blocs, souches, végétation aquatique…) et halieutiques (ponton handicapé, aire de pique-nique, signalétique…) et ainsi permettre à de nouveaux pêcheurs de découvrir cette activité.

Ce partenariat met en exergue « le rôle irremplaçable que l’agriculture, activité économique nourricière, structurante des paysages, par nature utilisatrice d’eau pour les besoins des plantes et des animaux, joue dans la préservation de cette ressource précieuse et des milieux humides qui lui sont liés ». « La bonne gestion de l’eau, son stockage, son utilisation compensée, sont au cœur des préoccupations des agriculteurs et permettront le maintien et le développement de cette activité centrale pour le développement économique des territoires audois », insistaient les deux présidents.

A. Ch.

François Mitterrand et son action coloniale de la Guerre d’Algérie au génocide des Tutsis du Rwanda à l’occasion des 40 ans de l’élection de 1981

Mail du 11 Mai 2021.

Rassemblement décolonial: Lundi 10 mai à 17h45, esplanade F Mitterrand, Métro Jean Jaurès

« Dans ces pays-là, un génocide, ce n’est pas trop important. » F Mitterrand, été 1994, paroles recueillie par le journaliste P. de St Exupéry

https://toulouse.demosphere.net/rv/23227

Le collectif toulousain « Stop françafrique » propose de profiter de cette date anniversaire pour rappeler qui était F. Mitterrand, sa place dans le système (néo)colonial de la Guerre d’Algérie jusqu’au génocide des Tutsis du Rwanda, en n’oubliant pas les personnes qui défendent aujourd’hui encore son action au Rwanda.

Dès ses premiers pas en politique, comme ministre de l’intérieur, il s’oppose à l’indépendance de l’Algérie. Ferme partisan d’une solution militaire, il donne tous les pouvoirs à l’armée en matière de justice sur le sol algérien. C’est aussi l’homme du discours de La Baule (1990) sur une hypothétique démocratisation de façade de l’Afrique, mais en parallèle il est également un des artisans du maintien de la politique françafricaine. Ainsi, Mitterrand apporte un soutien indéfectible aux dictateurs africains. Le génocide des tutsis de 1994 au Rwanda en est le point d’orgue !

Suite à la publication du rapport Duclert en mars 2021, les « responsabilités lourdes et accablantes » des autorités françaises de l’époque et la « faillite de la France au Rwanda » sont reconnues. Les autorités françaises « ont fait preuve d’aveuglement continu dans le soutien à un régime raciste », un soutien qui « procède d’une volonté du chef de l’État [F. Mitterrand] et de la présidence de la république ».

Nous, collectif associatif et politique, voulons rétablir cette vérité. L’objectif n’est pas de cacher les plaques où le nom de F. Mitterrand apparaît, mais ajouter la mention : « François Mitterrand, Président de la Françafrique (1981-1995). Complice du génocide des Tutsis au Rwanda en 1994 », pour expliquer ce que l’État français a fait dans le passé en notre nom et qu’il continue à faire aujourd’hui dans son pré carré africain.

Si comme nous, vous vous sentez trahis par la politique étrangère que la France mène en notre nom, vous pouvez participer à cette action de collage et dire votre indignation, le lundi 10 mai à 17h45 Esplanade François Mitterrand (métro Jean Jaurès)

Collectif « Stop Françafrique – Dehors les troupes françaises du Sahel et d’Afrique »

Les Amis du Monde Diplomatique de Toulouse – ATTAC 31 – BDS Toulouse – CGT Educ’action 31 – CNT 31 – Ligue Panafricaine UMOJA – NPA 31 – PCOF 31 – PCRF – POI 31 – Secours Rouge Toulouse – Solidaires 31 – Survie Midi Pyrénées – UCL Toulouse – Union des Étudiants de Toulouse.

Pour nous joindre : stopfrancafrique@protonmail.com

États-Unis 2021: Néolibéralisme malmené et la gauche en embuscade !

Publié le 11 mai 2021 | Poster un commentaire

Ayant été député ou sénateur pendant 39 ans, et vice président du pays pendant huit ans supplémentaires, Joe Biden a eu évidemment tout le temps pour se faire un profil de politicien que Wikipedia situe avec raison à « l’aile droite du parti Démocrate ». Alors, que se passe-t-il que les uns après les autres des économistes de gauche et même d’extrême gauche se déclarent « surpris agréablement » par le bilan des 100 premiers jours de la présidence de Biden, allant même jusqu’à constater qu’il s’éloigne du néolibéralisme dominant ?

Comme en notre époque il n’y en a plus de miracles, ce qui se passe c’est tout simplement qu’il y a désormais aux États-Unis non seulement de très importants mouvements populaires mais aussi des forces de la gauche radicale jouissant d’une influence sociale sans précédent, capables de faire sentir leur présence au centre de la scène politique, et même d’imposer quelques unes de leurs thèses et de leurs propositions ! Et pour preuve, voici tout de suite comment se manifeste cette capacité sans précédent de la nouvelle gauche américaine d’influencer et de « gauchiser » les politiques de ce président Biden, par ailleurs conservateur chevronné, tout en luttant et mobilisant sur son propre programme revendicatif et émancipateur.

Alors, tandis qu’en Europe, où les gouvernants ne ressentent pratiquement pas des pressions venant de la gauche, les plans de relance économique se résument à la recette usée jusqu’à l’os de l’austérité draconienne, les plans correspondants de la présidence de Biden se distinguent par leurs différences quantitatives et surtout, qualitatives. Non seulement parce qu’ils représentent des investissements de plusieurs milliers de milliards de dollars, mais surtout parce qu’ils ignorent les vaches sacrées du néolibéralisme que sont la dette et l’inflation, mettent en avant la politique au lieu de l’économie et partent de la satisfaction des besoins de la population. En d’autres termes, ils constituent un changement de cap après un demi-siècle de politiques néolibérales de tous les gouvernements précédents, tant républicains que démocrates. Et certainement, ils constituent un éloignement sinon une première rupture avec les dogmes et les contraintes du néolibéralisme !

Évidemment, la situation politique pour le moins malsaine et la menace permanente représentée par Trump et les siens, ainsi que la pression asphyxiante exercée par les crises cataclysmiques économique, sanitaire, climatique et sociale expliquent en partie le changement de cap de la nouvelle administration américaine. Cependant, les plans de relance du président Biden n’auraient jamais été axés sur la lutte contre la catastrophe climatique et les inégalités, si on n’avait pas vu se développer ces 5-6 dernières années aux États-Unis des mouvements sociaux de masse (pour le climat, la santé, l’éducation, les salaires, le logement, l’antiracisme, les infrastructures délabrées et évidemment, les droits des femmes et des minorités) qui ont convaincu et mobilisé des dizaines de millions de citoyens autour de la nécessité de donner au plus vite des solutions à ces problèmes.

Mais, tout ça étant dit, que fait actuellement la nouvelle gauche américaine ? Est-ce qu’elle se repose sur ses lauriers et se limite au classique « soutien critique » au président Biden ? La réponse est un Non catégorique. D’autant plus que la politique étrangère de la nouvelle administration est – pour l’instant – très agressive et réactionnaire, ne se différenciant substantiellement de celles des administrations précédentes (1). C’est ainsi que tandis que, tout au moins à l’intérieur du pays, prévaut le constat que Biden surprend agréablement de puisqu’il prend la bonne direction, tous les mouvements sociaux, les syndicats de lutte de classes et les représentants de la gauche radicale (d’Alexandria Ocasio-Cortez et Bernie Sanders au vieux anarchiste Noam Chomsky) déclarent d’une seule voix qu’il « s’agit seulement d’un premier pas positif », qui n’est pas pourtant suffisant car les temps et les besoins des gens demandent beaucoup plus !

Voici donc pourquoi, dans la rue mais aussi dans le Parlement et le Sénat, la gauche radicale américaine choisit de contrer et dépasser Biden pas seulement en paroles mais surtout en actes. C’est ainsi qu’au plan présidentiel de 2 mille milliards de dollars à investir dans les cinq ans à venir principalement dans les infrastructures et contre les inégalités, elle oppose son propre projet de loi – déjà déposé au Parlement – qui prévoit des investissements de mille milliards de dollars par an, ou 10 000 milliards pour les 10 ans à venir, dans les infrastructures, le climat et l’emploi ! Mais, la différence avec le plan présidentiel n’est pas seulement quantitative. Elle est surtout qualitative puisque son propre plan appelé THRIVE (Transform, Heal, and Renew by Investing in a Vibrant Economy), met en toute première ligne de ses priorités les minorités opprimées, les peuples indigènes, les syndicats ouvriers et plus généralement, les victimes des politiques néolibérales et de la catastrophe climatique. De quelle manière ? En stipulant que 50% des investissements du plan devront aller à ces communautés opprimées, lesquelles devraient d’ailleurs fournir 50% des citoyens embauchés pour travailler pour le plan THRIVE. Et aussi, en prévoyant la constitution d’organes communs représentatifs de ces groupes sociaux opprimés, afin qu’ils soient ces organes et nul autre, qui décident où et comment se feront les investissements, et quels de leurs besoins devront être satisfaits en priorité.

Ce n’est pas un hasard que le plan THRIVE qui tire son inspiration de Green New Deal, est signé et présenté par le sénateur Ed Markey qui, ensemble avec Alexandria Ocasio-Cortez, a élaboré le plan Green New Deal il y a deux ans. Il est donc intéressant de voir comment ce même sénateur Markey a présenté il y a quelques semaines, la « philosophie » du plan THRIVE et plus généralement, de la nouvelle gauche américaine : « Les politiciens ne peuvent plus ignorer les réalités vécues par des millions de Noirs, de “Browns”, des Indigènes, des immigrants et des familles ouvrières dans toute l’Amérique. Les quatre crises qu’affronte l’Amérique nous tuent littéralement. C’est le changement climatique, la pandémie de la santé publique, l’injustice raciale et l’inégalité économique. Nous ne pouvons pas vaincre une seule de ces crises. Nous devons développer un plan d’action qui les affronte toutes à la fois…

Est-ce qu’il est envisageable qu’un projet de loi comme THRIVE soit voté et devienne loi ? Ses inspirateurs n’ont pas d’illusions. Il ne sera pas voté bien qu’il y a déjà une centaine de députés Démocrates qui s’empressent de le parrainer ! Cependant, pour l’instant, leur objectif est tout autre : Ayant ce projet de loi comme arme, provoquer une agitation sociale de grandes dimensions, en mobilisant les communautés et les classes directement intéressées sur leurs concrètes revendications et plans d’action. D’ailleurs, le même objectif est partagé par les auteurs d’un autre projet de loi encore plus ambitieux et radicale, qui vient lui aussi s’opposer un plan du président Biden.

Il s’agit du gigantesque plan CCC (Civilian Climate Corps for Jobs and Justice Act) d’Alexandria Ocasio-Cortez (dite AOC) et du sénateur Ed Markey, lequel est opposé au plan présidentiel du même nom. Tous les deux sont une version actualisée du célèbre CCC (Civilian Conservation Corps) du président Roosevelt qui, aux années ‘30, a mis au travail 3 millions de chômeurs pour mettre en application son New Deal. Mais, les ressemblances s’arrêtent là. En effet, tandis que le plan de Biden ne prévoit pas d’embaucher plus de 200 000 travailleurs, celui de AOC-Markey veut créer une “armée” de 1,5 million de travailleurs destinés à soigner quelques unes des plus grandes plaies des États-Unis : les infrastructures vieillissantes et délabrées, l’eau dangereusement polluée au plomb (presque la moitié des Américains ne boivent pas de l’eau propre), la pollution atmosphérique, les incendies de plus en ravageuses, et avant tout, le changement climatique mais aussi le chômage puisqu’il est calculé que ce plan pourrait bien créer 15,5 millions de nouveaux emplois. 

Mais, attention : Les différences entre ce plan et ceux de Biden et Roosevelt sont énormes. Tandis que le plan de Roosevelt, et dans une certaine mesure celui de Biden, laissent leurs travailleurs sans sécurité sociale et ne les rémunèrent pas bien, celui des AOC-Markey qui vient d’être déposé à la Chambre des Représentants, garantit une pleine et complète couverture maladie, un salaire horaire de 15 dollars et des bourses pour la formation professionnelle de ses 1,5 million travailleurs. Et à l’opposé du CCC de Roosevelt, qui acceptait les discriminations raciales et excluait les femmes et les minorités, le CCC de la nouvelle gauche américaine donne la priorité à la satisfaction des besoins des communautés opprimées (dont la toute première est celle des peuples indigènes), libres de décider en commun avec les syndicats ouvriers et les collectivités locales, le contenu et la planification de leurs actions !

Ceci étant dit, il est clair qu’on se trouve devant des plans qui dépassent largement la simple résolution des problèmes, aussi grands soient-ils, et nous introduisent potentiellement à la problématique de la construction d’une société démocratiquement organisée de transition meta-capitaliste. Et tout ça de manière claire, concrète et directement compréhensible par une grande partie de la population, et aussi avec la participation active de cette même population, laquelle y aura le rôle de protagoniste!

En dernière analyse, beaucoup sinon tout dépendra de la direction que prendra la lutte de classe, de quel côté va pencher la balance sociale. Et avant tout, dans quelle mesure on assistera à la répétition des grèves de masse et des autres grandes mobilisations sociales sur lesquelles s’est appuyé le New Deal dans les années ‘30. Nous terminons donc en donnant la parole à celle qui est peut être la figure la plus emblématique du nouveau syndicalisme de lutte de classes américain, la présidente du syndicat des personnels navigants Sara Nelson, qui déclare sans ambages que le moment de la mobilisation des travailleurs est arrivé : « C’est à nous d’exploiter ce moment et construire sur cette conjoncture favorable pour faire passer la PRO Act (le projet de loi qui protège les droits syndicaux), récupérer les droits électoraux, s’organiser par millions, battre l’inégalité, lutter pour l’égalité, gagner l’assurance maladie pour tous, sauver la planète avec des bons emplois syndiqués, et assurerl’épanouissement de notre démocratie »

Yorgos Mitralias


Notes

1. C’est peu après la publication de la version en grec de ce texte qu’est tombée la nouvelle du positionnement de l’administration américaine en faveur de la suspension des brevets sur les vaccins anti-covid. Il s’agit d’un énième, mais cette fois très important développement qui confirme pleinement que les mouvements sociaux et la nouvelle gauche américaine sont bien capables d’influencer et même de changer en mieux les politiques du président Biden et de son administration. La suite des événements promet d’être passionnante..

Le Coronavirus contre l’individu : une bataille perdue d’avance

Source : Carla Costantini – ELM

Peu habitués que nous sommes à l’expérience des grandes crises qui secouent l’humanité, l’arrivée d’une pandémie mondiale, la crise du Coronavirus, a fait naître son lot de fantasmes et de passions. Tour à tour sont apparus les annonciateurs d’une proche fin du monde, et les mélancoliques romanesques narrant leur traversée du confinement avec l’intensité comique d’un matamore. Vinrent ensuite les révolutionnaires en papier mâché luttant contre la volonté destructrice d’un nouvel ordre mondial qui nous enfermerait dans une matrice orwellienne savamment huilée, ou encore, les néo-macroniste dont la vie a été momentanément figée pour mieux prendre conscience du besoin impérieux de « se réinventer », devenir « vraiment soi-même » et investir dans le bitcoin ou les NFTs.

Que ce soit dans un camp ou dans l’autre, ce qui frappe avant tout, c’est la violence, le ridicule, l’intensité et la cacophonie des réactions observables depuis plus d’un an, qui relèvent en soi d’un problème plus profond et préexistant à notre soudaine insécurité sanitaire.

Ce problème commence dans la seconde moitié du XXe siècle, avec l’apparition d’un néo-capitalisme promouvant l’hédonisme et l’abondance. Il s’articule autour d’un marché libre, et de rapports de production carnassiers, broyant tout sur leur passage : le collectif, les structures sociales essentielles et/ou traditionnelles, ou encore, l’environnement. Cette nouvelle formation a eu sa propre philosophie, s’il fallait n’en nommer qu’une, ce serait celle d’Ayn Rand, qui a conceptualisé les notions d’objectivisme et « d’égoïsme rationalisé ».

Pour la philosophe, la poursuite de l’égoïsme individuel est la seule morale acceptable. Son Best-seller « Atlas Shrugged » est considéré comme le livre le plus influent aux États-Unis, après La Bible. Or, si la globalisation a effectivement sacrifié notre économie, dépossédée de ses outils protectionnistes, elle a aussi eu pour conséquence une relative harmonisation culturelle, qui, loin d’être harmonieuse, a rendu la France tout aussi perméable à la philosophie Randienne… Il en ressort que l’infrastructure économique d’un pays engendre nécessairement un bouleversement immense dans le conditionnement des individus, ou, plus prosaïquement, sur leur psychologie. Les périodes de crises multiples se présentent alors comme autant de révélateurs à grande échelle de cette psychologie.

Parmi les nombreuses observations concernant ce conditionnement économique des individus, il y en a une, absolument triviale, sur laquelle à peu près tout le monde se retrouve : la société de consommation a bouleversé notre rapport aux objets, aux autres, à la vie, à la mort, et au temps. Tout le monde ne s’accorde pas sur les conséquences de ce bouleversement, mais certains éléments semblent sauter aux yeux. La famille, par exemple, tend à devenir un modèle dépassé et autoritaire.

Notre identité devient une assignation non consentie par une société désireuse d’imposer un cadre illégitime et oppressant. Le temps est une entité qu’il faut parvenir à maîtriser pour épouser un planning compétitif. Les objets, quant à eux, sont des outils mis à notre disposition pour fabriquer, dans une totale liberté orientée, une forme de singularité chimérique. Pour se construire une place dans la société et dans le monde. Ils sont un vecteur de réussite et d’épanouissement.

L’individu enfin libéré par le marché se retrouve livré à lui-même, il est désormais pleinement responsable de la conduite de son existence, rien ni personne ne peut plus l’entraver. Tout ce qui lui arrive n’est que le fait de ses mérites et de ses échecs, sous le regard inquisiteur de son public du quotidien. Le sociologue Alain Ehrenberg dans La Fatigue d’être soi, dépression et société propose une démonstration de la manière dont ce désenracinement de l’individu le conduit à s’enliser dans une culpabilité de vivre, souvent désigné sous le diagnostic de la dépression. Beaucoup plus tôt, dès les années 70, Christopher Lasch nous alertait sur la déliquescence déjà engagée de nos modèles de vie occidentaux : le culte de l’individu, la culture du narcissisme ne peuvent qu’aboutir à rendre impossible tout projet collectif, pourtant indispensable pour que subsiste le contrat social. Si le néolibéralisme est une maladie, l’autonomisation mortifère de l’individu dans un contexte d’extension des inégalités, en est l’un des principaux symptômes.

Or, cette crise du Coronavirus, loin de pourfendre le grand Capital, nous enferme dans sa logique, une logique post-moderne qui ne cesse de nous diviser, de nous polariser, et de faire de nous des caricatures. C’est désormais clan contre clan, partisan A contre partisan B, le mal contre le bien, le mensonge contre sa vérité. Le doute n’existe plus, car pour sortir de son isolement, l’individu contemporain doit épouser pleinement une cause, qui se définit davantage par un ennemi à abattre que par un monde à penser. Il n’est plus question de confronter de « grands récits » comme ceux que l’on pouvait retrouver dans le marxisme ou la philosophie des Lumières. Cette fin des croyances caractérise notre condition postmoderne, telle que définie par Jean-François Lyotard. La vérité devient nécessairement fragmentée et subjective.

Dès lors, pour sortir de la vacuité de son existence, il suffit individuellement de lutter contre le mal. C’est oublier que le mal n’est qu’une fiction, il est simplement le résultat de l’ignorance, et cela se sait depuis l’Antiquité et la tirade de Socrate dans « Protagoras » de Platon (352 c). Cette atomisation de la société en une infinité de tribus militantes explique en partie la cacophonie des réactions, parfois amusantes, souvent désespérantes, qui a rythmé l’année 2020.

Pendant ce temps, « en haut », il y a les décisionnaires aux commandes. Ceux-là n’ont jamais appris à composer avec la réalité matérielle. Ils résolvent les difficultés à coup de slogan et de symboles vides de sens. Emmanuel Macron est en guerre, par conséquent il est un chef de guerre. L’accroche ayant été trouvée, il ne reste plus qu’à déployer l’arsenal rhétorique pour construire un imaginaire épique, celui d’un président « Bonapartien » aux commandes, qui réussira par la force de sa détermination à sauver l’Eur… la France. Première victime du post-modernisme, notre président de la République croit pouvoir apaiser un pays malade du Covid – mais aussi et surtout, malade du mépris qu’on lui assène – par la simple expression de la magnificence supposée de son être. En bas, il y a ceux qui subissent, et parmi eux, il y a ceux qui souffrent plus que jamais de leurs conditions de vie, de la paupérisation passée et de celle, encore plus violente, à venir.

À cette France qui portait le Gilet Jaune il y a peu pour rappeler son droit à une vie décente et respecté, on ne proposera rien. Comme d’habitude, avec l’étroite collaboration des médias, Grands maîtres des questions à débattre, toute l’attention du pays sera dirigée vers la crise sanitaire, sans chercher à comprendre qu’elle n’est qu’une manifestation systémique, sans expliquer qu’il faut réinventer intégralement nos rapports de production, notre modèle économique aliénant. Sans dire que le Coronavirus n’est qu’une étape de plus, et qu’il cédera la place à des évènements toujours plus graves si nous ne nous décidons pas de nous intéresser enfin aux causes des maux qui nous accablent.

Les causes sont multifactorielles et complexes. Penser des alternatives crédibles et efficaces, mettre en place une praxis, tout cela ne peut se concevoir dans un contexte de guerre de « tous contre tous », où parfois Loup des Steppes, parfois Loup pour l’homme, les individus ne peuvent plus ou ne veulent plus dialoguer. En réalité, il suffit de faire quelques pas en arrière pour percevoir que le débat public n’est qu’un immense dialogue de sourds, dénué de tolérance, et de bienveillance. Les influenceurs politiques, les intellectuels, ne parlent qu’à eux même. Ils se vendent eux aussi à coup de slogan, et même en appartenant à « l’opposition », ils jouent le jeu avec les règles du pouvoir, les règles de l’époque.

Le monde d’après, comme les crédules se plaisent à le nommer, n’est que le monde d’hier dans lequel tout a été exacerbé : le complotisme grandit à mesure que les institutions ont donné gage de leur incompétence et parfois de leur malveillance. Les bourgeois se déconnectent de plus en plus radicalement de la réalité économique et sociale du pays. Le « petit milieu » politique entre en effervescence, pour ne pas dire en transe, pour la course au pouvoir rendue potentiellement plus juteuse en période de grande instabilité politico-sociale.

Enfin, les citoyens, noyés dans un vide de sens absolu, incités à participer à l’ignorance collective, sont à la poursuite d’un espoir, malgré la colère et la désillusion. Ils se déchirent, ils cherchent quelque chose ou quelqu’un en qui croire. Parfois ils tombent sur un gourou, mais finalement, les gourous ne sont-ils pas partout ? Sur les plateaux TV, dans les librairies, sur les réseaux sociaux ? Chercher l’homme providentiel n’est-il pas une évidence dans un système qui nous biberonne aux mythes des grands hommes, à la réalisation personnelle, à l’instantanéité et aux vérités simplistes ?

Ces gourous, individus narcissiques par excellence, animés par leur « égoïsme rationalisé », exacerbent nos émotions, ils en usent et abusent. Ils contribuent eux aussi à rendre le dialogue confus, à décrédibiliser les postures nuancées. Ils raillent la complexité du réel, pour y imposer une indignation sourde et inconditionnelle. Ce faisant, ils se frottent les mains, récoltant tous les profits de notre incapacité à nous unir et nous comprendre.

Quand la nuance est une offense, quand l’immanence prime sur la transcendance, quand l’émotion guide nos réactions, croire en l’avenir est le plus difficile des paris.

Source : Carla Costantini – ELM – 06-05-2021

Eoliennes, le gouvernement brasse du vent !


par Charles Sannat | 3 Mai 2021 |

Les éoliennes posent de véritables problèmes. Le recyclage, la pollution visuelle, sonore et magnétique.
Sur terre, comme en mer, la construction de ces machines géantes n’est pas anodine.
Et tout cela doit être mis en perspective avec l’énergie réellement produite, intermittente et coûteuse.
Bref, c’est loin, comme le solaire, d’être un miracle écolo !
Je vous laisse découvrir ce reportage sur les éoliennes en mer et un article ci-dessous consacré à ce sujet passionnant.
Océans 3, la voix des invisibles, une drôle de guerre.
Pour la vidéo c’est sur le lien ici
Qui sème le vent récolte la tempête ? Le gouvernement veut des éoliennes, mais pourrait les payer aux élections
Le gouvernement tente de relancer l’éolienne en mer. Des centaines d’entre elles doivent voir le jour sur le littoral. Un second souffle auquel ne croit pas Fabien Bouglé, qui dépeint une fronde qui monte dans les provinces contre l’installation d’éoliennes que leur impose Paris. Pour l’essayiste, la question éolienne s’invitera aux élections.
« Vu la colère que j’observe dans le monde rural, je ne vois pas comment cela peut continuer. C’est impossible.»
Réagissant auprès de la rédaction de Sputnik, Fabien Bouglé n’y va pas par quatre chemins. En début de semaine, le gouvernement annonçait les candidatures retenues pour développer et opérer la huitième centrale d’éoliennes au large des côtes françaises.
Le signe d’un «nouveau départ» de l’éolien maritime, saluait une partie de la presse nationale. Un «chant du cygne», ironise pour sa part l’auteur du livre Éoliennes: la face noire de la transition écologique (Éd. du Rocher, 2019). « Dix ans après le bouclage de ces premiers appels d’offres, il n’y a toujours pas d’éolienne en mer en France », exception faite d’un démonstrateur qui a vu le jour au Croisic, raille l’essayiste.
« Ils essaient à tout prix d’imposer leurs éoliennes marines, contre vents et marées, en détruisant l’activité maritime », enfonce-t-il le clou. « Parce que madame Pompili, qui est l’allié objectif des industriels de l’éolien, continue de diffuser de fausses informations sur l’acceptabilité des éoliennes en mer », accuse Fabien Bouglé.
Celui-ci rappelle la mobilisation contre l’installation des précédentes centrales d’éoliennes le long des côtes françaises. En juin 2017, un groupe d’associations de pêcheurs des côtes de la Manche et de l’Atlantique avait déposé plainte contre l’État français auprès de la Commission européenne. Leur angle d’attaque: les « dizaines de milliers d’emplois » menacés, tant dans la pêche que dans l’activité touristique. Ils refusaient l’émergence sur les côtes des centaines d’éoliennes « de 185 à 216 mètres de haut ». Des projets en « contradiction avec les politiques de protection de l’environnement marin », « hautement subventionné » et « qui priment les activités économiques existantes », accusaient ces pécheurs qui fustigeaient alors la « parodie de concertation démocratique » menée par le ministère de l’Écologie.
Si aujourd’hui, la ministre de la Transition écologique a fait savoir qu’elle voulait que ce huitième contrat éolien maritime soit acté « avant l’élection présidentielle de 2022 », cette échéance figure également à l’agenda de Fabien Bouglé. Selon lui, il ne fait aucun doute que «l’éolien va être l’un des sujets clivants de la campagne présidentielle» sur les thématiques de l’écologie et de la souveraineté énergétique. « Il y aura un vrai vote anti-éolien » en 2022, prédit-il, en évoquant de surcroît le positionnement anti-éolien de plusieurs candidats pour les Régionales du mois de juin.
Parmi les principaux prétendants à l’investiture suprême, Xavier Bertrand a fait connaître son intention de rompre avec la politique énergétique actuelle. « Il y en a marre […] il faut aussi dire les choses très clairement, c’est devenu un scandale ! », s’emportait ce dernier, mi-avril, au micro de Jean-Jacques Bourdin. Le président de la région Hauts-de-France ne s’est toutefois pas déclaré contre l’implantation d’éoliennes en haute mer.
La multiplication des éoliennes en France, la suppression des voies de recours et l’allègement des procédures pour faciliter leur installation par les promoteurs, crée une colère populaire profonde, un rejet, qui aura des conséquences dans le cadre des élections présidentielles », affirme Fabien Bouglé.
n rejet qui se ressent à la lecture de la presse régionale, où l’unanimité en faveur des éoliennes prônée par le gouvernement disparaît soudain.
Échéances électorales: vers un vote anti-éolien?
Plaintes de riverains pour nuisances sonores ou exaspérés à cause de leurs logements devenus invendables, mobilisation contre des projets de construction, voire des attaques au cocktail Molotov contre les chantiers, sans parler de cas de surmortalité dans des élevages bovins… Pas une semaine ne passe sans son lot d’actualités témoignant des crispations engendrées par l’implantation tous azimuts des aérogénérateurs sur le territoire français.
Face aux inquiétudes que des parlementaires remontent, du côté du boulevard Saint-Germain, on met en avant la « visibilité » offerte aux élus locaux sur les implantations d’éoliennes et le fait que « leur avis est systématiquement demandé lors de l’enquête publique », à défaut de leur octroyer un droit de veto. En témoigne la réponse adressée mi-mars à Hervé Maur, sénateur de l’Eure, par Bérangère Abba, secrétaire d’État chargée de la Biodiversité. Cette ex-conseillère municipale de Chaumont lui a expliqué que régions et collectivités n’avaient qu’à s’entendre sur la manière de remplir les «objectifs de développement de chaque énergie renouvelable» fixés par Paris.

«Invasion éolienne»: la colère monte en France
Des objectifs régulièrement décuplés. Au printemps 2016, Ségolène Royale signait un arrêté pour doubler le parc éolien terrestre d’ici 2023. La Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) impulsée par Barbara Pompili prévoit l’installation de 15.000 nouvelles éoliennes en France à l’horizon 2035. « Quand on est dans une forme d’excès, la situation se retourne forcément contre vous », tranche Fabien Bouglé.
« C’est une autre rupture sociologique entre le milieu parisien, qui peut se déplacer en métro et en vélo, et la campagne qui subit la délocalisation de la pollution avec les éoliennes. Il ne faut pas se leurrer, les éoliennes dans les campagnes ne sont qu’une délocalisation de la pollution des centres urbains », assène l’essayiste.
« Je ne vois pas comment le prochain Président ou Présidente de la République ne sera pas contraint d’arrêter les éoliennes », continue-t-il. En juillet dernier, ce sont pas moins de 165 associations environnementales qui, en Nouvelle-Aquitaine, ont déposé un recours devant le tribunal administratif contre un document de la région qui selon eux validerait « l’invasion éolienne ».
Rien que ce mois-ci, 22.000 signataires d’une pétition appellent Emmanuel Macron « à sauver» la montagne Sainte-Victoire. Ce massif du Haut-Var, labélisée « Grand site de France », qui doit sa renommée mondiale au peintre Paul Cézanne, fait l’objet d’un projet de construction de 22 éoliennes de 125 mètres (l’équivalent d’une tour de 46 étages).
Une partie a déjà été installée dans une zone Natura 2000. Cette zone protégée a été partiellement déboisée afin de permettre aux semi-remorques, transportant les palles et les 1.500 tonnes de béton nécessaires aux fondations de chacune des éoliennes, de passer. Une situation qui écœure tant les associations de défense de l’environnement qu’une partie des riverains. Autre information en apparence plus anecdotique, mais qui interpelle, le cas d’Ambernac, une commune charentaise de 400 âmes, qui sera bientôt cernée par un septième champ d’éoliennes, au grand dam de ses habitants.
Au bouleversement du quotidien des Français résidant en province s’ajoute une autre question d’ordre national : celle de la souveraineté énergétique du pays, qui pour l’heure dépend encore d’EDF, son énergéticien historique national. Actuellement cible de la Commission européenne, qui pousse depuis des années la France sur la voix d’une coûteuse politique visant à encourager une concurrence, dont les éoliennes ne sont finalement que la part émergée de l’iceberg.