Théorie économique : pourquoi la monnaie a émergé

Marius-Joseph Marchetti Publié le 3 décembre 2021

L’émergence de la monnaie est du au fait qu’elle soit une institution essentielle à toute société civilisée et nécessaire au développement de la coopération sociale.

L’argent, ou la monnaie, n’est pas une sorte de péché originel de l’Homme, un outil de la corruption, comme le laissent entendre Rousseau et d’autres penseurs. L’argent est à la base même de la division sociale du travail. Comme l’a soulevé brillamment Ludwig von Mises, c’est la liberté économique et donc de facto la monnaie, qui permet à chaque homme de chercher et de trouver une place au sein de la coopération sociale et de prendre part à la société.

De nombreux théoriciens se sont intéressés à la monnaie, à la raison de son émergence, son rôle, sa valeur, etc. Les auteurs mainstream affirment avant tout que la monnaie a émergé principalement parce qu’elle réduit les coûts de transaction, ou les coûts de l’échange entre les individus.

Par exemple, Armen Alchian estime que la monnaie permet d’économiser un certain nombre de connaissances sur les biens non monétaires. C’est vrai, mais pas seulement. Un unique individu n’a jamais eu l’idée de créer de la monnaie et l’a fait par suite de sa volonté. En réalité, l’émergence de la monnaie a suivi un long processus de sélection des standards ou étalons monétaires.

Du troc vers la monnaie comme moyen d’échange

Originellement, l’échange se faisait par le troc, c’est-à-dire l’échange des objets contre des objets. Les économistes disent qu’il existait proportionnellement autant de taux de change qu’il y a de biens sur le marché. S’il existe 50 biens, il fallait connaître les 49 taux de change qui existaient entre notre bien et les 49 autres, et ainsi de suite.

Bien entendu, dans le cas du troc les échanges sont fortement restreints et ce d’autant plus que les biens qu’on souhaite échanger sont eux aussi périssables. Imaginez un marchand de poissons qui devrait échanger tous ses poissons contre d’autres biens avant de devoir les jeter. S’il échoue, il aura perdu autant en pouvoir d’achat.

À ce stade, il arrive que par ce processus de troc, un bien en particulier se détache et commence à devenir un bien de référence aux échanges. Par exemple, dans certaines contrées des coraux étaient très utilisés comme moyen d’échange. Dans d’autres, c’était les troupeaux de bêtes. Carl Menger nous apprend dans Principes d’économie politique que la dot des filles se comptait en nombre de bêtes.

Carl Menger est connu comme le fondateur de l’École autrichienne d’économie, mais également pour sa querelle autour des méthodes avec les historicistes allemands, et en ce qui nous concerne ici, pour son célèbre papier sur les origines de la monnaie.

Selon lui, c’est l’intérêt des hommes qui les a guidés à travers un processus incrémental vers l’adoption de biens particuliers comme moyen d’échange, du fait de leur aptitude à être écoulé. La monnaie n’est pas née d’une fixation arbitraire par les pouvoirs publics mais par le désir des hommes de trouver un meilleur moyen de coopération sociale visant à échanger.

La monnaie, comme déterminée par un processus de sélection et de tâtonnement, aura des implications sur les travaux de ses successeurs.

Ludwig von Mises en sortira son théorème de la régression monétaire, qui poursuit les travaux de Menger, Friedrich Hayek et Ludwig Lachmann poursuivront les travaux de Menger dans le domaine des institutions en général.

Reprenons notre examen.

Que se passe-t-il, lorsqu’un bien de référence se popularise ? Il devient un intermédiaire aux échanges et réduit d’autant plus le nombre de taux de change entre les biens. Chaque individu n’a pas qu’à connaître le taux de change entre le bien qu’il vend et le bien-standard. Le bien-standard devient donc une unité de compte. La division sociale du travail s’accroît, facilitant le développement des échanges.

Mais pas seulement : le bien-référence finit par être sélectionné car il est le plus vendable (saleable) ou le plus liquide (Hayek parle de moneyness). Plus le bien est divisible et facile à transporter, plus on dit qu’il est liquide. Le bien-référence est également sélectionné car sa valeur est stable et connue. On dit qu’il est une réserve de valeur.

Ce qui constitue cette valeur du bien monétaire sont aussi les usages non-monétaires que celui-ci peut avoir, garantissant ainsi les anticipations de sa valeur. Comme expliqué par Ludwig von Mises dans sa Théorie de la Monnaie et du Crédit, la monnaie a d’abord besoin d’avoir une valeur d’échange objective pour être sélectionnée en tant que monnaie.

Une fois que le bien de référence est découvert, il facilite les échanges en même temps que son nouveau statut stimule la demande pour ce même bien, ce qui a tendance à le rendre d’autant plus liquide, et finit par en faire un intermédiaire officiel aux échanges.

Cet effet boule de neige, décrit par Israel Kirzner, est une extension de la théorie de Carl Menger sur l’émergence de la monnaie et la théorie de la régression monétaire de Mises. Kirzner soulève le rôle de certains individus alertes à la découverte de poches d’opportunités pures de profit, qui permettent un usage extensif du bien monétaire.

Historiquement, au fil du temps, deux métaux ont fini par être sélectionnés comme bien de référence aux échanges : l’or et l’argent. C’étaient des unités de compte pratique, très liquides et dont la valeur était relativement stable dans le temps. On se servait de l’argent pour les petites transactions et de l’or pour les transactions plus conséquentes.

Par la suite, les deux métaux sont devenus de la base monétaire, de monnaie interne (inside money pour George Selgin, et money in the narrower sense pour Ludwig von Mises). Ils étaient stockés dans les coffres des banques qui fournissent des billets de banque, qui étaient des certificats de dépôts : on parle ici de substituts monétaires, monnaie externe (outside money pour George Selgin, money in the broader sense pour von Mises). Toute personne qui le désirait pouvait échanger ses billets et récupérer son or : la monnaie était convertible.

La banque libre, une extension de la régression monétaire ?

Après l’apparition de cette monnaie marchandise standardisée, le système bancaire a donc continué à évoluer :

L’évolution d’un système bancaire libre, après l’apparition d’une monnaie marchandise standardisée, passe par trois étapes. Il s’agit, premièrement, du développement de services de base de transfert d’argent qui se substituent au transport physique de la monnaie ; deuxièmement, de l’apparition de dettes bancaires à vue facilement assignables et négociables (monnaie interne) ; et troisièmement, du développement d’arrangements pour l’échange courant (« compensation ») de monnaie interne entre banques rivales.

Le temps historique qui sépare ces étapes n’est pas crucial. Le chemin du développement, plutôt que d’être un progrès régulier comme décrit ici, peut en pratique comporter des faux départs ou des sauts créatifs. Ce qui est essentiel, c’est que chaque étape soit le prolongement logique et invisible des circonstances qui l’ont précédée. En d’autres termes, chaque étape successive du processus d’évolution trouve son origine dans la découverte par les individus de nouveaux moyens de promouvoir leur intérêt personnel, le résultat étant un arrangement qu’aucun individu ne vise consciemment. Bank Deregulation and Monetary Order, George Selgin et Lawrence White

Selon Selgin et White, la régression monétaire s’étend jusqu’à expliquer les différents arrangements monétaires présents sous le système de la banque libre. Les banques sélectionnent des réserves fractionnaires, suivant la loi des grands nombres, pour constituer des réserves prudentielles à même de couvrir les compensations interbancaires et les demandes fluctuantes de conversion des billets en monnaie interne. Historiquement, celles-ci ont couramment proposé des taux d’intérêt sur les dépôts en vue d’attirer des fonds supplémentaires, les banques se faisant concurrence pour attirer les dépôts.

De plus en plus, les banques ont commencé à accepter les billets des autres banques, et à demander auprès de celles-ci des compensations en leur retournant  : ce qui oblige les banques à ne pas créer trop de billets (monnaie externe), pour être sûres d’avoir les réserves nécessaires aux remboursements.

C’est pour cela que le système de la banque libre est dans le même temps plus stable que n’importe quel système de banque centrale, tout en étant une source importante du financement de l’économie (comme le fut l’Écosse durant tout le temps où la banque libre, ou ce qui se rapproche le plus de la banque libre, a duré).

Avec le temps, dans certains pays, des maisons de compensation ont fini par voir le jour : elles sont en quelque sorte les banques des banques, des structures où les banques s’enregistrent, qui s’occupent des compensations entre les banques, mais pas seulement.

Lorsqu’une banque ou un groupe de banques ont besoin de liquidités, la maison de compensation peut leur permettre d’avoir des prêts à court terme (qui leur évite de vendre des actifs et de transformer leur non-liquidité en non-solvabilité).

Une banque qui n’est pas enregistrée à la maison de compensation est souvent une banque dont la solvabilité est mauvaise et a mauvaise réputation, car la maison de compensation a nécessairement un œil sur le bilan des banques dans l’exercice des compensations interbancaires.

Elles peuvent également avoir la fonction supplémentaire d’émettre des billets dans des cas de pénurie de monnaie, comme lorsque les banques américaines étaient réglementairement obligées d’acquérir de nouveaux bons du Trésor pour émettre de nouveaux billets.

Cet examen mériterait d’être bien plus poussé et bien plus précis que ce je n’ai fait que brièvement ici. Cependant, le but n’était que de présenter l’évolution de l’émergence d’une monnaie vers le développement d’un marché bancaire et bancaire avec ces mécanismes poussés.

Bien sûr, aujourd’hui, avec l’hégémonie des Banques centrales et la fin de toute convertibilité avec un étalon de valeur, les monnaies sont devenues de simples monnaies-papiers ou fiat money) : vint ainsi l’âge d’or des crises économiques.

Mais nous y reviendrons plus tard.

Le rôle-confiance de la monnaie : au cœur de la pensée monétaire de Georg Simmel

L’échange est un phénomène sociologique sui generis, une forme et une fonction originales de la vie sociale. C’est l’une des formes les plus primitives de la socialisation humaine ; non pas dans le sens où la société existait déjà et entraînait des actes d’échange mais, au contraire, que l’échange est l’une des fonctions qui crée un lien intérieur entre les hommes – une société, au lieu d’une simple collection d’individus. George Simmel

C’est par suite de cet affaiblissement de la monnaie que celle-ci perd de son rôle informationnel, et donc coordinateur.

Le sociologue Georg Simmel, lecteur de Menger et des autrichiens, décrit l’argent comme un langage permettant à chacun de connaître les goûts des autres, un outil social nous permettant de nous comprendre les uns les autres.

Pour Simmel, comme pour Menger, la monnaie est un phénomène qui a émergé spontanément des interactions des individus qui font société, et non pas d’un édit ou d’un acte politique. En supprimant la liberté monétaire, on réduit la pertinence de la connaissance véhiculée par la monnaie.

L’argument de Georg Simmel fait énormément penser au papier L’usage de la connaissance dans la société, de Friedrich Hayek.

Le fait qu’un autre anonyme fasse du commerce avec de l’argent indique qu’il partage la confiance commune dans l’ordre social que l’argent incarne. […] Dans le cas présent, ceux qui participent à une économie de marché sont censés être des utilisateurs d’argent. Les anticipations que nous donnent les types idéaux nous permettent d’agir avec succès dans le monde social. L’idéal-type particulier d’un utilisateur d’argent nous permet dans l’ordre social étendu en nous fournissant des informations sur les autres acteurs anonymes du marché sans qu’il soit nécessaire d’avoir une connaissance complète de leurs intentions ou une interaction directe. Pour Simmel, cet aspect de l’argent est le moyen par lequel l’échange monétaire élargit l’éventail des libertés dont dispose l’individu. Steven Horwitz

L’une des choses qui permet à la monnaie d’être une source de trust, de confiance, c’est la stabilité de sa valeur. Plus les membres ont confiance dans les institutions et dans la monnaie en particulier, et plus l’économie de marché développe son potentiel et permet de satisfaire un nombre toujours croissant de besoins : c’est ce qui ressort d’ailleurs du développement de la banque libre et de ses mécanismes.

Pour Simmel, cette confiance contribue également à la nature évaluatrice de l’homme, qui lui permet de s’épanouir et d’explorer de nouveaux domaines dans le développement des arts et des sciences.

Pour maintenir cette confiance, trust, dans la monnaie, Georg Simmel avait cependant en tête une inflation zéro car comme les partisans de l’inflation zéro, il avait peur des anticipations d’inflation erronées et les influences qu’elles pouvaient avoir sur les prix relatifs. Cela n’est d’ailleurs pas étonnant, car avant les travaux de Von Mises et Hayek, l’inflation zéro était une proposition de Carl Menger dans son article sur la monnaie, Geld.

Cependant, Hayek et les partisans de la Banque libre (free bankers) ont en tête une norme de productivité, qui permet au prix de diminuer lorsque l’économie connaît des gains de productivité et inversement. Les arrangements monétaires doivent le plus se rapprocher d’une monnaie neutre, c’est-à-dire une monnaie qui reflète le plus fidèlement possible la structure des prix relatifs, en permettant le moins possible des perturbations monétaires d’influencer celle-ci.

Les institutions monétaires doivent ainsi avoir la capacité d’éviter les déséquilibres monétaires, inflationnistes comme déflationnistes. C’est ainsi que la monnaie sera véritablement une institution de confiance.

Pour Friedrich Hayek, la monnaie neutre n’est malheureusement pas un phénomène qu’on peut trouver dans la vie réelle. L’équilibre n’existe pas pour les économistes autrichiens. Ce n’est pour eux qu’un outil mental et heuristique permettant la déduction de lois de cause à effet, comme l’est l’économie en rotation constante décrite par von Mises dans L’Action Humaine.

Cependant, il faut privilégier la découverte d’institutions qui nous permettent de découvrir les erreurs que nous avons faites, de mobiliser de la connaissance, et d’aider à la coordination des plans des individus. Friedrich Hayek le pensait pour les institutions du marché, et il n’est pas étonnant qu’il ai étendu son analyse au domaine monétaire, en commentant les propositions de Milton Friedman ainsi : « Aucune autorité ne peut déterminer à l’avance, et seul le marché peut découvrir, la « quantité optimale de monnaie ». »

Les institutions, comme les personnes, ne sont jamais parfaites. George Selgin, Less than Zero

L’affaiblissement de la monnaie

Avec la fin de la convertibilité et la naissance des banques centrales, l’affaiblissement de la monnaie réduit la capacité de calcul économique que celle-ci fournit en tant qu’institution de marché.

Comme Goethe l’a écrit, le tableau comptable à double entrée est le symbole des institutions de marché érigées par la société occidentale pour combattre le problème du calcul économique. Les processus de marchés qui en découlent sont affectés négativement.

L’inflation monétaire et la déflation monétaire entraînent des altérations artificielles de la structure des prix relatifs, qui réduisent la confiance que les individus peuvent avoir dans les prix et autres signaux monétaires.

À l’inverse de ce que certains prétendent, comme l’ancien banquier central Charles Goodhart, la banque centrale n’est pas une évolution naturelle découlant des économies d’échelle dans la structure du marché bancaire. Celui-ci a cependant admis que la banque centrale n’était pas un arrangement institutionnel destiné à la stabilité monétaire et financière, mais plutôt à n’être qu’une source du financement des États en même temps qu’un symbole de leur souveraineté.

Si Simmel pensait que toute la monnaie évoluait vers une forme purement fiduciaire, il doutait en même temps qu’une confiance suffisante se développe pour soutenir la réalisation de ce processus. En particulier, Simmel craignait que l’abus des systèmes monétaires par les gouvernements ne conduise à la rupture de la confiance, qui dépend entre autres de la confiance dans la stabilité future du pouvoir d’achat de la monnaie (Frankel 1977). Simmel n’a pas abordé explicitement la question étroitement liée de savoir si, et comment, un gouvernement pourrait susciter la confiance nécessaire à la mise en circulation d’une nouvelle monnaie fiduciaire. George Selgin,  On Ensuring the Acceptability of a New Fiat Money

Conclusion

La monnaie n’est donc pas un outil du diable servant à répandre le vice sur le monde. C’est une institution essentielle à toute société civilisée et nécessaire au développement de la coopération sociale.

Il est important de comprendre le processus par lequel la monnaie émerge et les rôles qu’elle remplit.

D’abord si nous souhaitons en finir avec la planification centrale dans la banque, c’est-à-dire le système de banque centrale.

Et enfin pour que les défenseurs des cryptomonnaies comprennent que celles-ci devront remplir cette étape de régression monétaire (le test du marché) qui vise au jumelage avec un étalon de valeur objectif, et ne souffrent pas de la même présomption fatale qui accable les banquiers centraux.Par :

Marius-Joseph Marchetti

La loi de Say et la loi de Walras pour comprendre les crises

Marius-Joseph Marchetti

Lorsque l’équilibre sur le marché de la monnaie n’est pas maintenu, les conséquences sont dramatiques. Explication de la loi de Say et la Loi de Walras.Partager sur:Sauvegarder cet article0

J-B Say, domaine public. Publié le 27 décembre 2021

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Qu’est-ce que la loi de Say ?

À quelques occasions, nous avons répondu à ces questions et fourni quelques éclaircies sur ce que les économistes appellent le plus souvent La loi de Say des marchés. Beaucoup ont étendu la compréhension de cette loi, qui est une description du fonctionnement des marchés, à la prise en compte de la demande et l’offre de monnaie, et donc à la théorie du déséquilibre monétaire.

Certains économistes, comme Lord Keynes, ont essayé de réfuter cette loi en ne faisant rien d’autres que supposer sa validité du fait de leurs différentes propositions correctrices.

In fine, certains économistes de l’École autrichienne et de la Banque libre ont montré que le maintien de la loi de Say ne peut se faire que dans un système de banque libre où les rigidités institutionnelles à la flexibilité des prix sont minimisées et où le déséquilibre monétaire est réduit par l’équilibre entre la demande de monnaie et l’offre de monnaie.

Pour l’écriture du présent article, je me suis énormément servi des livres de Larry SechrestSteven Horwitz et William Hutt, qui sont cités au long de celui-ci. J’invite donc les lecteurs curieux souhaitant davantage de détails à se pencher sur ces travaux.

Résumé de la loi de Say

Comme écrit ailleurs, la loi de Say énonce que toute production est source de la demande.

En termes micro-économiques et subjectifs plus justes, et selon la définition de l’économiste William Hutt elle est le principe selon lequel « la demande d’un bien est fonction de l’offre des autres biens non concurrents ». Nous sommes dans le cas d’une économie, ou dans le cas d’une économie de troc, où la monnaie n’est qu’un simple numéraire sans influence réelle aucune. Les produits s’échangent donc contre des produits, et la monnaie n’est qu’un intermédiaire aux échanges, le simple véhicule des valeurs.

C’est avec la vente des produits qu’on fait les achats, et donc toute production ouvre des débouchés aux produits. Ainsi, comme William Hutt l’écrit dans son A Rehabilitation of Say’s Law, l’emploi de tous est l’emploi de chacun.

Quand un travailleur trouve un emploi, il est en capacité de demander des biens et des services non concurrents (on peut supposer qu’un informaticien n’ira pas demander les services d’un autre informaticien, par exemple). La détention d’actifs productifs (notre force de travail par exemple) nous permet d’en obtenir la valeur monétaire avec des personnes qui les estiment sur le marché.

Tout engorgement, toute crise de surproduction n’est donc pas possible, dans des conditions normales. La seule condition qui permette à des marchés en particulier d’être sclérosés, et donc d’affecter négativement d’autres marchés, c’est l’intervention publique, surélevant artificiellement le prix de certains dans des industries protégées, par exemple avec le contrôle des prix, ou encore la présence de syndicats ou de droits de douane/réglementations dans certaines industries (les deux allant historiquement de pair).

Cette protection a des répercussions sur le reste des industries car les capitaux et les hommes se dirigent vers le secteur protégé rendu artificiellement plus lucratif. Elle affecte négativement ce que William Hutt appelle le multiplicateur. Le non-respect de la loi de Say engendre donc des effets cumulatifs, qui provoquent du chômage, des goulots d’étranglements, et une utilisation sous-optimale des ressources de la société.

La discussion de William Hutt nous permet de comprendre que les effets cumulatifs de la non-utilisation de ressources dans un secteur peuvent entraîner des effets plus généraux. Supposons qu’un secteur de l’économie soit en mesure d’imposer des taux de salaire supérieurs à leur niveau d’équilibre sur le marché. Les entreprises offriront moins d’emplois à un salaire plus élevé. Le flux salarial perdu par cette capacité de production retenue signifie, par le biais de la loi de Say, que la demande de produits non concurrents diminuera.

La réduction de la demande dans ces industries exercera une pression à la baisse sur les salaires. S’il y a de la résistance aux réductions de salaires dans ces industries, le niveau d’emploi et le flux des salaires diminueront, ce qui implique un cycle supplémentaire de réduction de la demande dans les industries qui ne sont pas en concurrence avec celles en question. Dans la mesure où des taux de salaire incompatibles avec le niveau de revenu existant et les anticipations des entrepreneurs sont maintenus, des travailleurs potentiellement productifs ne seront pas embauchés et seront incapables à leur tour de demander des biens et des services aux entreprises (et à leurs travailleurs) dans les industries non concurrentes.

Un cycle original de fixation des salaires au-dessus de l’équilibre peut avoir des conséquences multiples sur l’ensemble du marché. C’est la loi de Say qui explique le processus multiplicatif en montrant comment la frustration de la capacité d’acquérir la valeur monétaire des services productifs dans un secteur se répercute sur la réduction de la demande dans les secteurs non concurrents. Le début de cette séquence dépressive provient donc des barrières face à la coordination des marchés, à l’aide des entrepreneurs guidés par les prix.

Pour restaurer la loi de Say, la solution est donc la réforme institutionnelle : il faut supprimer toutes les sortes d’intervention de la force publique sur les marchés. Cela restaurera les incitations productives des marchés où une production supplémentaire n’était pas rentable du fait de la demande sclérosée d’autres marchés, et qu’ils puissent produire une plus grande quantité de biens : pas de surproduction, pas de sous-consommation, et une meilleure allocation des ressources de la société (et donc un niveau de bien-être supérieur) sont les conséquences de la restauration de la loi de Say.

On peut attendre les mêmes effets cumulatifs, de manière bénéfique cette fois, à la suppression des barrières institutionnelles à l’ajustement des prix : plus vite les barrières tomberont, et plus vite la reprise sera vigoureuse.

Pour reprendre les termes de Steven Horwitz :

La non-utilisation (idleness) généralisée que la macroéconomie tente d’expliquer est mieux comprise comme un échec omniprésent et multiplicatif des intrants, en particulier de la main-d’œuvre, à être tarifés d’une manière compatible avec leur utilisation optimale. Que ce soit à cause de l’inertie, des grèves, de la menace de grève, des lois sur le salaire minimum ou d’autres barrières psychologiques ou institutionnelles à des taux de salaire plus flexibles (surtout à la baisse), le chômage est fondamentalement un problème microéconomique.

L’empirisme occasionnel confirme également cet argument en termes très généraux en comparant le degré de flexibilité du marché du travail et les taux de chômage des pays d’Europe occidentale avec ceux des États-Unis. Les syndicats plus puissants et les réglementations du marché du travail plus intrusives qui caractérisent généralement l’Europe occidentale empêchent la flexibilité des prix nécessaire pour éviter la  non-utilisation face aux changements dans la composition des demandes de production. Microfoundations and Macroeconomics, A Austrian Perspective

La critique de Hutt de l’économie keynésienne

William Hutt revient également sur les propositions keynésiennes de création monétaire.

En effet, Keynes part du postulat de base que les prix sont rigides à la baisse (ce qui invalide la loi de Say), et qu’il faut donc un peu d’inflation pour diminuer le salaire réel (salaire nominal ajusté à l’inflation) des travailleurs sans que leur salaire nominal ne change. Comme cela a pertinemment été soulevé par Hutt et Horwitz, la proposition d’une politique d’inflation pour rétablir les salaires réels à leur juste niveau est un aveu de la validité de la loi de Say, et qu’un juste prix du travail sur tous les marchés est une condition adéquate à son maintien.

Le problème de l’approche de Keynes est qu’elle se fonde sur des agrégats, tel que le niveau moyen des salaires, et non pas sur l’analyse de certains prix du travail sur certains marchés. Or l’inflation affectera in fine tous les salaires, selon le lieu d’injection de la nouvelle monnaie. Cela occasionne ce que William Hutt nomme une coordination grossière (crude coordination) :

Mais si un peu d’inflation peut rectifier la situation, alors un peu de taux salarial raisonnable peut aussi la rectifier. Les économistes qui ont défendu le maintien ou la restauration inflationniste de la demande effective globale afin de combattre le mal du chômage n’ont jamais préconisé plus qu’une très légère inflation. Ils ont toujours espéré avec confiance qu’une petite dépréciation de la valeur réelle de l’unité monétaire (et donc de petites réductions des taux de salaire réels) serait suffisante pour rétablir le plein emploi et le flux des salaires. Ils doivent donc reconnaître le corollaire, à savoir que les réductions de taux de salaire nécessaires pour augmenter ou rétablir complètement le taux de salaire monétaire moyen sans inflation seraient également faibles.

Les faits de la reprise induite par l’inflation permettent en effet de déduire inéluctablement qu’en général, les élasticités de la demande de travail doivent être élevées. Si les responsables syndicaux en tant que groupe voulaient vraiment éviter à la fois les licenciements cycliques et le chômage chronique, ils feraient preuve de leadership et persuaderaient habituellement les membres de leurs syndicats non seulement de renoncer aux pressions salariales qui répriment depuis si longtemps le flux des salaires, mais aussi, à des moments appropriés, d’accepter les sacrifices temporaires nécessaires pour préserver ou restaurer les revenus du travail. William Hutt, A Rehabilitation of Say’s Law

Il vaut mieux laisser les prix libres de diminuer, car le chômage provient de certains prix du travail sur certains marchés en particulier. Il n’y a pas un prix du travail, mais plusieurs prix du travail sur plusieurs marchés : le chômage est un problème de prix micro-économique.

De plus, intervenir par de l’inflation va occasionner des effets de redistribution dans d’autres secteurs, et créer un équivalent des faux droits de Jacques Rueff (nous y reviendrons plus tard). Une augmentation de l’offre de monnaie ne crée pas de valeur, seulement l’augmentation de nombre de containers dans lesquels le pouvoir d’achat véhicule.

La loi de Say est perturbée : le principe selon lequel « la demande d’un bien est fonction de l’offre des autres biens non concurrents » (la définition de la Loi de Say par Hutt) ne tient plus en cas de création monétaire inflationnaire. De plus, le capital étant un facteur rare (à l’inverse de ce que pense Keynes) la hausse des prix des facteurs de production finira par rattraper les anticipations des entrepreneurs qui devront reformuler leurs plans, et auront en plus consommé leur capital, comme décrit par la théorie autrichienne des cycles.

Cette critique du keynésianisme vaut tout autant pour les nouveaux classiques, qui voient l’inflation comme sans effet sur les prix relatifs si celle-ci est anticipée, sans prendre en compte la réalité des individus et des institutions du monde réel : la connaissance est radicalement fragmentée et dispersée, quelque soit la pertinence des agrégats utilisés : la seule chose qui compte, c’est la réalité des prix relatifs sur ce qu’ils informent des décisions individuelles des consommateurs et des producteurs.

C’est pour cela que la loi de Say (et certains phénomènes économiques en général) est moins bien comprise par ceux qui utilisent davantage une approche macro-instrumentale que micro-souveraine (Lawrence H. White).

Si les prix sont plus rigides dans la réalité que ce que ne le laisse entendre la théorie (la plupart des classiques l’admettent aussi), il est important que les processus institutionnels ne rendent pas cette rigidité plus importante encore, voire insurmontable, pour éviter les effets cumulatifs engendrés par le non-respect de la loi de Say.

Ainsi, les entrepreneurs pourront pleinement se lancer dans le processus de découverte des prix et des salaires qui permettent de produire les quantités de biens demandées par les consommateurs. Il n’y a pas de commissaire-priseur à la Walras dans le monde réel. Il n’y a que des entrepreneurs qui découvrent des opportunités de profits, si on les laisse faire.

Demande effective et demande notionnelle ou théorique

Revenons-ici sur deux notions qui nous seront utiles pour comprendre les implications monétaires de la loi de Say, et qui ont été avancées par Steven Horwitz : la demande théorique et la demande effective.

La valeur des ressources fournies peut être considérée comme les biens que l’on peut potentiellement acheter avec le revenu généré par la vente ou la location de ses ressources. C’est ce que Steven Horwitz appelle la « demande théorique » ; à l’inverse, il appelle la valeur des biens réellement demandés la « demande effective ».

Ces termes offre et demande ne font pas référence à l’offre ou à la demande d’un bien spécifique, mais à l’offre et à la demande globales. En d’autres termes, la loi de Say suggère que l’offre de biens en général crée une demande de biens en général, ou, pour réitérer les termes utilisés précédemment, la demande théorique crée sa propre demande effective.

Nous devons donc nous demander : la demande théorique peut-elle réellement créer la demande effective ? Que se passe-t-il lorsque ces deux notions ne sont pas équivalentes ? C’est ce que nous allons voir dans les prochains paragraphes.

Implication des trois lois identifiées par Sowell

Dans son livre Say’s Law: An Historical AnalysisThomas Sowell décrit les trois variantes, ou forme, de la Loi de Say :

Sowell les identifie comme étant la loi de Walras, l’identité de Say et l’égalité de Say (1972, 34-35). L’égalité de Say stipule que, s’il y a équilibre sur tous les marchés (marchés des biens, marchés des facteurs et marché de la monnaie), la valeur nominale (prix de la monnaie multipliés par les quantités) des biens fournis sera égale à la valeur des biens demandés. Cela révèle la préoccupation classique concernant la disproportion sur des marchés spécifiques, par exemple le marché du travail (Hutt 1979, 135-77). L’égalité de Say établit que la demande théorique sera égale à la demande effective si une matrice d’équilibres prévaut.

L’identité de Say adopte une perspective à long terme dans laquelle il n’y a ni offre ni demande excédentaire de monnaie. Cette proposition affirme donc que la valeur nominale des biens offerts est identique à la valeur nominale des biens demandés. Il s’agit donc simplement d’une tendance générale à long terme. La loi de Walras stipule que la somme de la valeur des biens fournis plus la monnaie fournie est égale à la somme de la valeur des biens demandés plus la monnaie demandée. Cela implique qu’une quantité excessive de biens fournis est identique à une demande excessive de monnaie (Sowell 1972, 34).Larry Sechrest, Free Banking: Theory, History and a Laissez-faire model

En somme, l’égalité de Say est la loi de Say comme nous l’avons d’abord présentée, en présence de monnaie neutre ou de troc. Ensuite, l’identité de Say n’est qu’une projection sur le long terme de celle-ci. Mais le maintien de ces deux lois est conditionné par la loi de Walras : si la demande de monnaie est égale à l’offre de monnaie, alors la valeur des biens fournis (demande théorique) sera égale à la valeur des biens demandés (demande effective).

La loi de Walras est au cœur du problème.

Si l’équilibre monétaire se maintient (donc que la demande de monnaie est égale à l’offre de monnaie), il ne peut y avoir de perturbations monétaires susceptibles d’alimenter un cycle économique. La seule influence perturbatrice possible sera constituée par des chocs réels qui provoquent des déséquilibres temporaires sur des marchés spécifiques. Si l’équilibre monétaire est maintenu de manière plus ou moins continue, ces chocs réels n’auront pas d’effets envahissants ou durables.

La demande effective aura tendance à être égale à la demande théorique tant que le marché de la monnaie sera à l’équilibre. Par conséquent, bien comprise, la loi de Say n’est pas (et n’a jamais été) une proposition inconditionnelle, mais une proposition conditionnelle. En cas d’équilibre monétaire, la valeur attendue de la différence entre la demande effective et la demande théorique est égale à zéro.

Les déséquilibres monétaires occasionnés par le non-respect de la loi de Say

Au niveau le plus élémentaire, les cycles sont la preuve d’une désorganisation du marché.

Dans la phase d’expansion (le boom), il existe dans l’ensemble une demande excessive de biens. C’est-à-dire que les propriétaires de ressources, par exemple les travailleurs, demandent des biens dont la valeur marchande dépasse la valeur des ressources que les individus fournissent.

Pendant la phase de contraction (la récession), il existe dans l’ensemble une offre excédentaire de biens. Les propriétaires de ressources fournissent des ressources dont la valeur dépasse la valeur marchande des biens demandés.

Dans une économie de troc, il ne peut y avoir de différence entre la demande effective et la demande théorique. Cependant, lorsqu’il existe un bien plus commercialisable que tout autre et par conséquent plus ou moins universellement accepté comme moyen d’échange (la monnaie), un fossé peut se creuser entre la demande effective et la demande théorique. La monnaie n’est pas neutre, et elle a toujours des effets réels, surtout lorsque l’équilibre monétaire est rompu.

La demande théorique se traduit en demande effective par la monnaie. Si l’offre de monnaie est insuffisante, la demande théorique est supérieure à la demande effective. Si la masse monétaire est excessive, la demande effective dépasse la demande théorique. Dans le premier cas, on dit qu’il y a déséquilibre monétaire déflationniste (c’est le cas le plus souvent étudié par les économistes monétaristes) ; dans le second cas, on dit qu’il y a déséquilibre monétaire inflationniste (c’est le cas le plus souvent étudié par les économistes Autrichiens).

Que faut-il donc pour que la demande effective soit égale à la demande théorique ? En d’autres termes, qu’est-ce qui est nécessaire pour éviter les cycles économiques ?

La condition nécessaire, mais non suffisante, est l’équilibre monétaire. Des facteurs réels peuvent toujours perturber les marchés individuels, mais tant que l’équilibre monétaire prévaut, les effets de ces chocs réels seront minimisés.

Ce que fait l’équilibre monétaire, c’est permettre la plus grande coordination possible au niveau microéconomique en s’assurant que l’offre de monnaie interne est correcte – Horwitz 1990.

Hutt, dont nous avons précédemment parlé était un partisan de la stabilisation de MV pour éviter les troubles causés par un écart de l’équilibre monétaire (même si, comme Steven Horwitz le rappelle dans son livre, William Hutt s’est davantage intéressé aux déséquilibres liés aux phénomènes réels et non aux déséquilibres monétaires d’ordre déflationniste, comme Leland Yeager ou Robert Greenfield).

Comme l’écrit lui-même Jacques Rueff dans Le Lancinant problème des balances de paiement :

Le gros de la demande, en toute période, est fourni par la valeur des offres. C’est de cette constatation que la fameuse théorie des débouchés, de Jean-Baptiste Say, est l’expression approximative, donc inexacte. En réalité la demande globale s’écartera de la valeur globale des offres – et le niveau général des prix variera – toutes les fois qu’une divergence existera entre les variations, pendant la période considérée, de la quantité de monnaie en circulation [L’offre de monnaie] et du montant global des encaisses désirées [la demande de monnaie].

La prise en compte des déséquilibres monétaires permet de comprendre la confusion entre des crises de surproduction et de sous-consommation liées à des phénomènes réels et celles qui trouvent leurs sources dans la perturbation de la monnaie. Par exemple, un déséquilibre monétaire déflationniste, avec ces stocks d’invendus, ces pressions à la baisse sur les prix et le ralentissement des ventes, ressemble à s’y méprendre à une crise de sous-consommation. Dans ces cas-là, on dit qu’il y a investissement forcé (Steven Horwitz).

Lorsqu’il y a une demande excédentaire de monnaie, la ruée pour reconstituer ces soldes réels implique que les gens sont incapables à la fois de détenir les soldes réels qu’ils souhaitent et de continuer à dépenser pour les biens et services qu’ils aimeraient avoir (et, dans un certain sens, devraient pouvoir avoir, étant donné leur productivité). Comme la demande effective se relâche dans une section et que la baisse des revenus qui en résulte réduit la demande effective ailleurs, les producteurs constatent qu’ils n’ont pas l’argent nécessaire pour embaucher des travailleurs.

Un producteur peut être fermement convaincu que la productivité marginale d’un travailleur sera légèrement supérieure au salaire convenu entre les deux parties, mais étant donné ce que Leijonhufvud appelle une « contrainte de trésorerie » découlant de l’offre insuffisante de monnaie, le producteur ne peut pas trouver l’argent nécessaire pour effectuer le paiement. Les équilibres monétaires déflationnistes provoquent une fuite dans la transformation de la productivité en demande selon la loi de Say.

Le travail et le capital restent inactifs non pas parce que leur productivité a soudainement chuté, ni parce que les consommateurs ne veulent pas (du moins théoriquement) de leur production, mais parce que la demande excessive de monnaie empêche les gens d’effectuer des achats des deux côtés du marché. Steven Horwitz, Microfoundations and Macroeconomics

Dans le cas d’un déséquilibre monétaire inflationniste, il y a surinvestissement et malinvestissement, financé par l’épargne forcée des individus étant les derniers receveurs de la nouvelle monnaie créée. Dans ce cas-là, on en revient à la description faite le plus généralement par la Théorie autrichienne du cycle économique. Dans les deux cas, la faute est rejetée sur les consommateurs et les producteurs avides, et non sur le système bancaire, incapable d’ajuster l’offre monétaire aux fluctuations de la demande de monnaie.

Pour que l’équilibre monétaire soit maintenu, il faut donc que l’offre de monnaie soit égale à la demande de monnaie. Spécifions cependant que cela implique, comme George Selgin l’a montré, que le niveau des prix diminue lorsque l’économie connaît des gains de productivité (à l’inverse de ce que pensent Leland Yeager et Robert Greenfield). Si une économie connaît une stabilité des prix en cas de gains de productivité (et donc que MV, le revenu nominal, augmente), l’économie connaîtra un déséquilibre monétaire inflationniste, et entamera un cycle décrit par la théorie autrichienne.

En interprétant la monnaie comme un simple numéraire, bon nombre de théories contemporaines passent à côté du fait que la monnaie peut avoir des effets réels, qu’elle est un bien et a un prix (son pouvoir d’achat par unité) comme tout bien, et que ces effets sont dramatiques lorsque l’équilibre sur le marché de la monnaie n’est pas maintenu.

Par : Marius-Joseph Marchetti 27 décembre 2021