HADRIEN MATHOUX RÉDACTEUR EN CHEF POLITIQUE CHAMBOULE-TOUT


Un bon vieux cliché du journalisme sportif énonce que « tout va très vite dans le football » ; on pourrait également le dire en politique, tant les grands équilibres qu’on croyait immuables peuvent s’écrouler tel un château de cartes. Cette campagne des européennes, encore balbutiante, en offre l’illustration. 

Prenez le libre-échange : il était acquis, jusqu’à assez récemment, qu’une majorité de formations politiques plus ou moins proches du centre — l’auto proclamé « cercle de la raison » — défendaient mordicus l’anéantissement des barrières douanières, au nom du doux commerce. Cette certitude a volé en éclats au Sénat ce jeudi 22 mars. Malgré le branle-bas de combat des lobbyistes et l’obstruction macroniste, le Ceta, accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne, a été rejeté par les communistes, les socialistes… mais aussi la droite ! 

Autre axiome aujourd’hui explosé : le rôle majeur joué par cette même droite dans le paysage politique français. Longtemps hégémonique, quand elle n’était pas la première force d’opposition, la famille héritière du gaullisme traverse aujourd’hui une crise existentielle. Conséquence, son champion pour ces européennes, le bon chic bon genre François-Xavier Bellamy, se voit obligé de forcer sa nature et de courir les plateaux télés, jusqu’à celui de Cyril Hanouna… 

Signe que les temps ont vraiment changé, une nouvelle famille politique espère bien profiter de ces européennes pour se faire sa place au soleil : le Parti animaliste, qui avait réussi à dépasser des listes souverainistes et même à talonner le PCF à grands coups de chiens mignons sur ses affiches. Les animalistes peuvent-ils envoyer carrément des élus au Parlement européen cette fois-ci ? Tout va très vite dans la politique. 

Twitter @hadrienmathoux

Vert, Vendredi 22 mars 2024

Le Sénat met un stop au CetaCeta l’arrêt. Le Sénat français a largement rejeté la ratification du Ceta, un traité de libre échange entre l’Union européenne (UE) et le Canada. Alors que le monde agricole critiquait en début d’année les accords favorisant la concurrence internationale au détriment de la souveraineté alimentaire (notre article), l’avenir du Ceta s’assombrit. Vert rembobine.
 C’est quoi le Ceta ?Le «Comprehensive Economic and Trade Agreement» est un (très long) texte destiné à faciliter la circulation des biens et services entre l’UE et le Canada, en réduisant les droits de douane et en allégeant les règlementations. Signé en 2016, le Ceta est mis en œuvre «provisoirement» à plus de 90% depuis 2017. Cependant, en France, il n’a été adopté à l’Assemblée nationale – de justesse – que deux ans après… et il n’avait jamais été transmis à la chambre haute jusqu’à ce jeudi, à l’initiative des communistes, soutenus par la droite.
 Qui s’y oppose et pourquoi ?Ce deal économique et commercial est contesté de longue date, notamment parce qu’il accentue l’industrialisation agroalimentaire. «Ce que nous importons, ce sont des biens stratégiques, et non de la viande aux hormones», a assuré devant le Sénat Franck Riester, le ministre du Commerce extérieur. Mais pour Greenpeace, «le Canada a recours à des OGM et à des pesticides non autorisés par l’UE, utilise des farines animales pour alimenter ses élevages et dope ses animaux aux antibiotiques».
Des activistes protestent contre le Ceta avant une visite du Premier ministre canadien en 2017 en Allemagne. © Steffi Loos / Getty Images via AFP
Que va-t-il se passer maintenant ?Après ce refus du Sénat, l’Assemblée nationale va devoir à nouveau voter sur le texte. Mais on ignore quand, car le gouvernement risque de traîner des pieds pour le mettre à l’agenda. Si les député·es sont d’un avis contraire aux sénateur·rices, le Ceta sera officiellement ratifié par la France. Si l’Assemblée est du même avis que le Sénat et que le gouvernement notifie ce refus aux institutions européennes – ce qu’il n’est pas obligé de faire -, la ratification du traité sera abandonnée, ouvrant la voie à une fin d’application dans toute l’UE… à moins qu’un nouveau vote soit organisé en France, par le gouvernement ! Neuf parlements d’autres États membres ne se sont toujours pas prononcés sur le Ceta. Aurélie Delmas

Le rejet du Ceta, entre hara-Kiri et vache qui rit moins

Publié par Pleinchamp

Le Sénat a massivement rejeté un accord de libre-échange appliqué dans l’indifférence totale depuis 7 ans. Le Ceta est assez emblématique des contorsions idéologiques auxquelles peuvent se livrer les Etats, ici le Canada et la France, et les filières, ici le lait et la viande bovine, pour arrondir les angles de leurs prés… carrés.

Alors que le Chili ou encore la Nouvelle-Zélande disputaient depuis quelque temps la vedette au Mercosur, le Ceta vient de se réinviter à la table toujours bruyante des accords de libre-échange. Le Sénat a quelque peu cassé l’ambiance, au point que la majorité présidentielle a quitté l’hémicycle avant un vote perdu d’avance. Le veto des sénateurs parachève en France un processus démocratique par ailleurs inachevé dans l’ensemble des Etats membres de l’UE, mais qui n’avait pas empêché l’accord de s’appliquer depuis 7 ans, sans que personne n’y trouve rien à redire. Et pour cause : si l’on en croit le gouvernement, le bilan comptable entre la France et la Canada est depuis largement à notre avantage, y compris dans le secteur d’ordinaire sacrificiel qu’est l’agriculture. De là à y voir une sorte de hara-Kiri ou de hara-Vache-qui-rit…

Le Canada, une bulle laitière…

Avec les vins et spiritueux, la filière laitière nationale est en effet l’une des principales filières agroalimentaires bénéficiaires de cet accord en particulier et des échanges internationaux en général. En 2023, elle a enregistré un bénéfice commercial de +2,5 milliards d’euros. Dans le secteur laitier, le Canada a pris le contre-pied total du libre-échange. Depuis 1971, le pays a fermé ses frontières en instaurant un système de gestion de l’offre, via un triple contrôle de la production, des importations et des prix. La production nationale est alignée sur la demande intérieure, garantissant aux éleveurs un revenu stable et équitable, sans subvention et sans dumping vis-à-vis de pays tiers, cadenassant au passage les industriels mais posant quelques problèmes de transmissibilité des exploitations. Le prix du lait reste abordable pour les consommateurs mais le plateau de fromages un peu moins affriolant que le nôtre, il faut bien le dire. D’où la tentation d’emprunter nos appellations pour exciter à peu de frais le cortex de nos « cousins ». Ce que le Ceta contrecarre, en garantissant la protection d’IGP et d’AOP, notamment fromagères. Ha ha…

… un libéralisme débridé en viande

En revanche, dans le secteur de la viande, le Canada pousse le libéralisme à son paroxysme, en autorisant sur son sol la culture des plantes OGM destinées à l’alimentation animale, l’usage de farines animales dans cette même alimentation ou encore et le recours à des substances anabolisantes en production bovine (et porcine). Autant de saveurs que le pays était généreusement disposé à livrer à nos vierges papilles, quitte à creuser un peu plus notre déficit commercial en viande bovine. Un chiffon rouge agité par les sénateurs – en dépit des garde-fous inscrits dans le Ceta – dans un savoureux faux-semblant d’unité transpartisane. Tant que le faux-filet de Blonde d’Aquitaine, de Charolaise ou de Limousine n’est pas faux…

Un article de Raphaël Lecocq

Ernst Ludwig Kirchner

Éloge à Ernst Ludwig Kirchner

« Les influences de Kirchner étaient doubles : il appréciait particulièrement les couleurs vives telles que les employaient les neo-impressionistes, mais également la sculpture sur bois pratiquée en Afrique ou en Océanie. Membre fondateur de Die Brücke, et fer de lance du mouvement expressionniste, son oeuvre caractérisée par des lignes épaisses, de violents contrastes de couleurs et une simplification brutale des formes propose une virulente critique de la société berlinoise à travers laquelle il expose ses angoisses. Stigmatisé par le régime nazi comme étant un « artiste dégénéré », il se suicidera en 1938, non sans laisser derrière lui quelques toiles majeures du XX ième siècle. »

Vallée de Sertig en automne. La vallée de Sertig se situe près de Davos en Suisse.

Davos en été. En Suisse.

Vue de Bâle et du Rhin

Intérieur avec deux filles, 1926